Lars Noren

Auteur

Considéré depuis longtemps comme le successeur d'August Strindberg, Tchekhov, Hjalmar Bergman, ou Ibsen, il poursuit la même thématique centrée sur les problèmes parapsychologiques, psychiatriques ou psychosociaux.

Auteur de plus de quarante pièces de théâtre, son œuvre, sans être autobiographique, est imprégnée de résurgences personnelles telles que les perversions sexuelles, les maladies psychiatriques, les relations conflictuelles entre parents et enfants et le recours à la violence.

Après avoir succédé à Ingmar Bergman à la tête du Théâtre National de Suède, Norén devient, à partir de 1999, le directeur artistique du Riks Drama au Riksteatern, le théâtre national itinérant suédois.

En 2007, il publie et met en scène une pièce de théâtre intitulée À la mémoire d'Anna Politkovskaïa, en référence à la célèbre journaliste russe assassinée en octobre 2006.

En 2018, il entre au répertoire de la Comédie Française avec Poussières, pièce sur la vieillesse écrite pour la troupe de l'institution.

Le 26 janvier 2021, il meurt des suites du Covid-19.



LA NUIT EST MÈRE DU JOUR

Traduction : Christophe Perton


Deuxième Acte
 (12.00 - 16.30)
 La radio marche, l'horloge de l’Hôtel de Ville sonne douze coups - puis vient  "Le Poème du jour". Ulf Palme lit un poème de Rjalmar Gullberg. Martin est seul dans la cuisine, il prépare le déjeuner et ferme la radio. Il a enlevé sa veste et bu quelques verres - cela ne se remarque pas. Il a caché des bouteilles d'alcool en divers endroits. A la fois inquiet et détendu. Il verse négligemment à côté et ne s'en aperçoit pas. Il fait cuire quelque chose. Essuie des assiettes. Met la table. La regarde. Approuve. Siffle. Fait une pause dans ses préparatifs. On le voit contrôler toutes les portes et toutes les fenêtres, puis ouvrir un élément sous l'évier, sortir une bouteille d'un seau rempli d'épluchures de pommes de terre, il boit, se rince la bouche, cro­que une pastille. Il parait bien aller. David a branché la minuterie pour les oeufs, tout à coup, elle sonne. Paniqué, Martin se retourne - Sale gosse... Il n'apprendra donc ja­mais. Pendant tout le monologue de Martin, Georg s'affaire dans le garage avec sa moto, il accélère au point de faire trembler les murs.

 

MARTIN : Ça doit leur suffire… Sinon, ils peuvent aller se faire servir ailleurs. Autant les appeler. (Il tâte son ven­tre) Quant à moi, je ne dois rien prendre, je le sens. Il n’y a pas à dire, le lait me donne mal à l'estomac — c'est comme une ventouse qui aspirerait quelque part par là. (Il tousse) et c'est pour ça que j'ai ces foutues irritations à la gorge … (Il rote, allume une cigarette. Regarde par la fenêtre) Oui, oui... Quelle heure est-il? Déjà midi... Il faut que je téléphone pour les alcools avant une heure. Il vaudrait mieux que je le fasse avant qu'ils ne descen­dent. (Il entre dans son bureau, compose Le numéro. At­tend.) Pourquoi ne répondent-ils pas? Allô? Oui bonjour, c'est l'hôtel. J'avais quelques petites commandes à passer!...